Déclarations de Donald Trump sur le besoin d’en finir avec la guerre en Ukraine : qu’en pense la Russie ?
- Dilan Radjib
- 1 févr.
- 4 min de lecture
Durant la campagne présidentielle américaine, le monde entier a observé les multiples déclarations de Donald Trump au sujet de la guerre en Ukraine. Celui-ci s’est dit prêt à régler le conflit en 24 heures. Forcé de constater que près d’une semaine à la suite de sa prise de fonction en tant que Président des États-Unis, le conflit dure bel et bien. Néanmoins, ces déclarations ont conforté l’idée que la guerre en Ukraine trouverait bien son issue en 2025 : arrêt de l’aide militaire américaine, incapacité des Européens à prendre le relais et résilience russe. Qu’en pensent ces derniers de l’arrivée de Donald Trump et comment voient-ils la suite de la guerre ?

Un sujet de campagne politique américaine
Les déclarations du candidat Donald Trump au sujet de la guerre en Ukraine étaient très nombreuses et s’inscrivaient avant tout dans le cadre du la campagne présidentielle. Les officiels russes expliquaient ainsi leur caractère très ambitieux : en septembre 2024, réagissant à une des déclarations, Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin disait : « Je ne pense pas qu’il existe une baguette magique. En 24 heures il est impossible de faire quoi que ce soit ». Néanmoins, la volonté de Trump d’en finir avec la guerre en Ukraine a été largement médiatisée par les principaux médias d’État russes. Chaque semaine durant la campagne, on pouvait retrouver des grands titres tels que : « Trump a déclaré que l’Ukraine n’existait plus » ou encore « L’Europe aura énormément de difficulté à soutenir l’Ukraine en cas de victoire de Trump ». Ce genre de titre permet tout de même d’associer l’accession de Trump au pouvoir à une potentielle fin de la guerre.
Offrir une perspective aux Russes
Il faut bien comprendre que dans le narratif de propagande russe, l’Occident et plus particulièrement les États-Unis sont les principaux responsables de la guerre. Dans cette perspective, le changement d’administration présidentielle américaine est synonyme d’une nouvelle politique étrangère. Surtout que Donald Trump a des déclarations qui vont dans le sens de la Russie : Joe Biden est responsable de cette guerre, l’Ukraine n’aurait jamais dû se lancer dedans, etc. Et surtout, Trump apparait aux yeux du Kremlin comme un partenaire de négociations plus intéressant : sans principes, sans scrupules et donc capable de faire des compromis sans prendre en compte des questions de principes ou de valeurs. Après l’investiture de Trump, Poutine a confirmé les mots de Trump, pour qui la guerre en Ukraine n’aurait jamais eu lieu s’il était au pouvoir. Il s’est dit prêt à rencontrer Donald Trump pour « discuter calmement ». Au Kremlin, on l’associe à des espoirs de fin (à l’avantage de la Russie) mais on ne se berne pas d’illusions : Trump n’aura pas les moyens de terminer ce conflit en moins de 24 heures. Les titres des journaux permettent surtout à la propagande russe de donner à la population une perspective du conflit, qui use véritablement la société russe et semble aujourd’hui sans fin.
La précipitation de Trump
Néanmoins, comme à leur habitude, les officiels russes se disent ouverts au dialogue, mais insistent sur le fait que ce sont eux qui sont en position de force. La caractéristique de Donald Trump, c’est sa conviction d’être capable de « faire des deals », en instaurant un rapport de force, technique largement utilisée également par les Russes. Cette volonté d’instaurer un rapport de force risque d’avoir l’effet inverse à celui désiré : il peut simplement braquer les deux parties, en les faisant camper sur leurs positions car personne ne souhaite paraître inférieur. Et dans ce contexte, les hostilités pourraient reprendre de plus belle : Trump décidera de ne pas arrêter le soutien américain à l’Ukraine et la Russie reprendra sa rhétorique anti-occidentale.
L’instabilité de Trump
Cette volonté de Trump d’instaurer un rapport de force vis-à-vis de la Russie est déjà visible à travers un de ses posts sur Truth Social, dans lequel il commence par exprimer tout son amour pour la Russie et les Russes, louer leur sacrifice dans leur aide apportée aux États-Unis dans la victoire de la Seconde Guerre mondiale avant de proposer à la Russie de lui faire une « faveur » et faire un « deal ». Et si elle ne faisait pas ce deal, Trump n’aurait d’autres choix que d’imposer des taxes, droits de douane et sanctions économiques. La réaction du Kremlin à ces déclarations a été très sobre, disant simplement qu’il ne voyait rien de nouveau dans ces menaces. D’une part, Trump a été le président américain qui a le plus sanctionné la Russie, durant son premier mandat. D’autre part, en employant les menaces de sanctions, Donald Trump n’innove pas considérablement la politique américaine des États-Unis vis-à-vis de la Russie.
Quelle perspective ?
Vu d’Occident, la couverture du personnage de Trump en Russie peut paraitre complaisante. De nombreux journalistes, éditorialistes des chaines d’État ont été très élogieux envers le candidat Trump, puis le président Trump. Mais comme dit plus haut, ces messages s’adressent avant tout à la population russe, à qui on souhaite montrer que des changements dans le cours de la guerre sont possibles à court terme, et surtout le caractère exogène de ces changements. Dans toute la rhétorique russe depuis le début de la guerre, la Russie se positionne en tant qu’acteur provoqué, en tant que victime à qui on n’a donné d’autres choix que de se défendre face à une Ukraine militarisée. Trump apparait comme celui qui est présenté non pas comme celui qui va établir de bonnes relations avec la Russie, mais surtout celui qui sonne le glas de l’aide à l’Ukraine. En ce sens, il s’aligne parfaitement sur le récit russe d’une Ukraine sous perfusion, d’une Ukraine comme État fantoche. Un Trump qui permettra finalement à la Russie d’accaparer l’Ukraine. Donald Trump veut bien en finir avec la guerre en Ukraine, et les officiels russes pensent que cela consistera à tout donner à la Russie. Cependant, ceci ferait apparaitre Trump comme faible, or il déteste cela, et son message dans Truth Social en témoigne. Alors, quelle fin de la guerre en Ukraine souhaite véritablement Trump ?





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